Hier après-midi a eu lieu la reprise du procès de Saddam Hussein et ses 7 généraux. Saddam Hussein est bien entendu le principal responsable de la répression des chiites en 1991, du gazage des Kurdes de Halabja en 1988, du déplacement de 182 000 kurdes entre 1987 et 1988 et accessoirement de méthodes de guerre interdites contre l’Iran ainsi que de la fameuse invasion du Koweït provocant la guerre du Golfe.
Pourtant ce procès traite en premier lieu du massacre de Doujaïl en 1982 ayant fait 143 victimes et 400 prisonniers à la suite d’un attentat envers Saddam. Plus étonnant encore, l’accusation espère bien que les coupables soient condamnés à mort au verdict de cette première affaire ce qui aurait pour conséquence de clore rapidement le procès.
On pourrait aisément se poser la question : pourquoi ne pas accuser Saddam des centaines de milliers de meurtres dont l’humanité le sait coupable ? Ou bien se demander pourquoi Slobodan Milosevic se fait actuellement juger par un tribunal international aux Pays-Bas pour des crimes de même nature alors que Saddam se fait juger par un tribunal irakien créé avec des fonds et l’assistance juridique des Etats-Unis en décembre 2003, à Bagdad, sous la tutelle de l’armée américaine qui prend la peine de censurer certaines parties du procès lorsque celui-ci est diffusé en direct à la télévision? Ou bien se demander pourquoi l'ancien ministre de la Justice américain Ramsey Clark (dont les opinions politiques divergent légèrement de celles du gouvernement américain actuel) et le Koweïtien Issam Azzaoui se sont proposés d’être les avocats de la défense afin que « la vérité soit établie pour l’Histoire » ?
Qu’y a-t-il de si important dans ce premier dossier que les crimes de Saddam les plus connus de l’Histoire soient ainsi mis au second plan ? Ou plutôt, que n’y a-t-il pas ?
Le 22 septembre 1980, Saddam attaque l’Iran. A l’époque, les amis et alliés de l’Irak qui avaient soutenu la dictature d’Hussein, c'est-à-dire le Royaume-Uni, la France et les Etats-Unis, approuvent l’agression par crainte de l’islamisme. L’URSS, fournisseur officiel de l’Irak en matière d’armement, faisant face à une rébellion islamiste en Afghanistan, soutient également l’invasion. Les voisins de Saddam, les monarchies arabes du Golfe dont le Koweït fait parti, éternelles ennemies des iraniens et des perses, manifestent également leur soutient.
La guerre entre l’Irak et l’Iran dure 8 ans, fait 1 200 000 morts, et n’aboutie à rien si ce n’est un renforcement des dictatures irakienne et iranienne.
Durant ce conflit, les Etats-Unis se font attraper entrain de vendre des armes à l’Iran en dépit de l’embargo. En 1981, la France livre 14 kilos d’uranium 235 (combustible nucléaire utilisé dans la fabrication d’armes atomiques) et apporte son savoir-faire en matière de nucléaire à Saddam. Ce n’est que par le bombardement du réacteur nucléaire d’Osirak par les israéliens que l’Irak n’accède pas au statut de puissance nucléaire. Par la suite, François Mitterrand continue d’alimenter Saddam en armement lourd et particulièrement en avions de guerre Super Etendard. Ce soutien causera par la suite l’assassinat de l’ambassadeur Delamare, l’explosion de l’immeuble Drakkar à Beyrouth ainsi qu’une vague d’attentats à Paris en guise de réprimande de la part de l'imam Khomeiny.
Lorsqu'il était enfant, l'oncle de Saddam lui dit de ne pas oublier: "Trois choses que Dieu n'aurait pas du créer, les Perses, les Juifs et les mouches."
Saddam massacre ensuite les populations chiites pro-iraniennes du sud de l’Irak. Saddam s’attaque également à la population Kurde du nord de l’Irak et tue 182 000 Irakiens kurdes dans des campagnes barbares de déplacements et de tueries. Puis le dimanche 16 mars 1988, il gaz le village irakien d’Halabja dont les habitants sont principalement kurdes et fait 5000 morts. Saddam commet ces actes avec les armes chimiques que lui ont fournies ses partenaires occidentaux qui ne protestent que très mollement aux génocides perpétrés par le dictateur irakien.
Sans parler des motivations financières susceptibles d’avoir pousser les nations unies à affronter militairement Saddam Hussein après l’invasion du Koweït, sans parler du maintient au pouvoir de Saddam Hussein après sa défaite lors de la guerre du Golfe, sans parler des armes de destructions massives jamais retrouvées, sans parler des liens imaginaires entre Saddam et Ben Laden, on se demande vraiment qui voudrait voir Saddam pendu le plus vite possible par les autorités irakiennes, en Irak, pour un crime commis en Irak, par Saddam, tout seul, sans l’aide de personne…
On notera tout de même le culot merveilleux de Saddam Hussein qui dès sa première intervention a accuser ses geôliers américains de lui avoir volé son stylo et de l’avoir forcé à monter deux étages à pieds sous prétexte que l’ascenseur était en panne. Y a plus de respect…
Sources : Le Monde, Libération, Nouvel Observateur, Wikipédia, The National Security Archives, Herodote.net