En 1968, Mel Brooks réalise le flim The Producers, inspiré de son propre livre, pour lequel il obtiendra l’oscar du meilleur scénario. Ce flim mettant en scène le fabuleux Zero Mostel et le génialissime Gene Wilder (Frankenstein Junior, Le shérif est en prison, Un rabbin au far-west) raconte les mésaventures de deux producteurs de Broadway qui tentent de monter la comédie musicale la plus désastreuse de tous les temps afin d’en détourner les fonds de production sans attirer l’attention de l’IRS (fisc américain).
Pour ce faire, ils obtiennent les droits d’une pièce intitulée Springtime for Hitler écrite par un ancien SS à la gloire du Führer, engagent le pire des metteurs en scènes de New York et recrutent mademoiselle Ulla Inka Hanson Benson Yanson Tallen Hallen Swadon Swanson, une charmante suédoise au niveau d’anglais déplorable, comme actrice principale.
A la sortie du flim, Mel Brooks rencontre à la fois un vif succès et des critiques cinglantes. Si le flim se fait interdire en Allemagne pour avoir osé présenter Hitler comme un inverti au grand cœur, il deviendra rapidement un objet de culte dans la communauté juive américaine au point de se faire adapter lui-même en comédie musicale à Broadway, pièce qui à l’heure actuelle est toujours mise en scène à travers les Etats-Unis.
En 2005, deux célèbres aficionados juifs de la comédie musicale, Matthew Broderick (Inspecteur Gadjet, Godzilla, Family Business) et Nathan Lane (Stuart Little, Titan A.E., The Birdcage), décident de remettre The Producers au goût du jour avec une adaptation cinématographique de la comédie musicale, qui je le rappelle est elle-même une adaptation du film original, qui je le rappelle est une adaptation du livre écrit par le producteur du flim actuellement sur nos écrans.
De nombreuses célébrités se sont prêtées au jeu pour l’occasion et le casting est tout bonnement remarquable. Uma Thurman (Pulp Fiction, Kill Bill, Les liaisons dangereuses), Will Ferrell (Melinda et Melinda, Jay and Silent Bob Strike Back, Zoolander), Roger Bart (Et l’homme créa la femme, Desperate Housewives, New York District), Gary Beach (Queer as Folk, Will and Grace), Jon Lovitz (J’ai épousé une extra-terrestre, Alarme Fatale, Prof et Rebelle, Little Nicky) et bien d’autres se sont glissés dans les peaux des personnages caricaturaux et déjantés qui défilent gaiement sur l’écran pendant 2h20.
Réalisé par la chorégraphe Susan Stroman qui signe ici son premier flim en tant que réalisatrice, The Producers passe malheureusement inaperçu en France où il n’est projeté que dans 12 salles. Outre la forte concurrence du moment avec entre autres Destination Finale 3, Big Mamma 2, Wu Ji, Essaye Moi, La Panthère Rose , Underworld 2, Derailed, Truman Capote, Mémoires d’une Geisha, Hostel, Hell, Braqueurs Amateurs, L’ivresse du Pouvoir, Syriana, Get Rich or Die Trying, Fauteuils d’orchestre, Le Nouveau Monde, Walk the Line, Marock, etc, il est fort étonnant de constaté qu’en 2006, le film choque une nouvelle fois le grand publique. Si de nombreuses personnes critiquent allégrement les longueurs du scénario, une spécialité melbrooksienne qui pourtant ne devrait plus surprendre personne, c’est malheureusement le thème satirique qui dérange une nouvelle fois les spectateurs bien pensants.
En effet, The Producers se moque principalement de l’homosexualité, des personnes âgées, d’Adolf Hitler et du troisième Reich avec irrévérence et il faut croire que ces sujets restent encore tabous de nos jours. Si la presse ciné s’attardera à démonter le film sur sa nature propre (la lourdeur, les parodies vaudevillistes, la caricature), le publique semble lui s’attaquer à ses points forts : « cet étalage de mauvais goût mérite tout de même d’être souligné. », « seul le début du spectacle Springtime for Hitler, où le public est médusé par l'irresponsabilité du show, se montre vraiment drôle, l'effet comique stoppant net dès que l'audience prend le parti d'en rire à l'apparition du Furher efféminé. », « c'est un magnifique film mais qui ne correspond pas a l'époque actuel. » « J’avoue, j’ai ri, j’ai même beaucoup ri… Pourtant j’étais fort gêné. », « Même au second degré, raconter la production d’un musical sur Hitler ne peut que mettre très mal à l’aise. »
Il est étonnant de constater qu’aux Etats-Unis le flim a obtenu son petit succès et n’a à aucun moment fait froncer les sourcils, alors que nous sommes les premiers à accuser les ricains de puritanisme tout en serrant les fesses à la vue d’une croix gammée, d’un pigeon exécutant le salut hitlérien, d’une chorégraphie en hommage à la race supérieure où de l’apparition d’un Führer gay comme un pinson à l’idée d’envahir la France.
The producers reste donc un ovni dans le paysage cinématographique actuel. Traitant avec disgrâce de sujets démodés qui troublent encore le français moyen, pataugeant dans une lourdeur qui dégoûtent les critiques pourtant promptes à classer Mel Brooks au rang des auteurs cultes, déployant avec classe un éventail musical jubilatoire qui pourtant ne sera pas sur le répertoire de la prochaine StarAc (je fais de toaaa mon esseeeence eeeelf), rendant un hommage vibrant à la comédie de boulevard dont raffole pourtant le parisien séculaire, ce flim va sous peu passer à la trappe et sur pastroplesboules on a les couilles de le dire, c’est bien dommage.